Henri Mollin, né en 1867 dans l'Isère, est issu d'une famille de très modestes d'agriculteurs. Il s'engage dans l'armée, à Lyon, à 19 ans, puis réussit le concours d'entrée à Saint-Maixent. Sorti de cette école 26e sur 335 élèves, il est nommé en 1892 au 76e régiment d'infanterie à Paris et passe lieutenant en 1894. Il commence ainsi une carrière tout à fait honorable
Mais le lieutenant Henri Mollin est maintenu plusieurs années dans le rôle de trésorier adjoint de son régiment alors qu'il souhaitait avoir des fonctions opérationnelles au sein de l'armée. Il avait pour cela des titres éminents puisqu'il était sorti 12e sur 335 de Saint-Maixent sous les aspects strictement militaires. Il adhère alors au Grand Orient de France.
Nommé officier d'ordonnance au cabinet militaire du général André en juin 1900, il y est alors le seul officier franc-maçon, et devient secrétaire particulier du général Percin, chef de ce cabinet. Et lorsque le ministre montrera son mécontentement de ne pas savoir, au moment de la promotion des officiers, s'ils étaient ou non fidèles à la République, Mollin interviendra auprès de son obédience pour obtenir les renseignements sollicités par le ministre. Le système des fiches commençait ainsi à fonctionner.
Qui a eu, le premier, l'idée de recourir à la franc-maçonnerie, afin d'obtenir des informations sur les opinions politiques des officiers ? Dans son livre, La Vérité sur l'Affaire des Fiches, publié en 1905, Mollin dit que c'est le général Percin qui lui a demandé s'il était possible de se faire aider par le Grand Orient. Interrogé en 1906 par le général Dalstein, gouverneur militaire de Paris, Percin dira que c'est Mollin qui lui avait proposé de recourir au Grand Orient. Au fond, peu importe qui a eu, le premier, l'idée de demander des renseignements à la franc-maçonnerie puisque le général André avait donné son accord à cette démarche. Il le dira très clairement dans son livre, Cinq Ans de Ministère, publié en 1907 :
"J'ai donné à mes collaboreteurs l'autorisation de demander et de recevoir des renseignements de tous les groupements et de toutes les associations républicaines, de la franc-maçonnerie comme des autres."
Il faut dire que la manie du renseignement était, à l'époque, répandue dans tous les secteurs de la société. Gambetta lui-même avait eu recours à la franc-maçonnerie pour connaître la proportion des officiers favorables ou non à la République. Les milieux catholiques n'étaient pas en reste : l'évêque de Grenoble, Mgr Fava et l'abbé Tourmentin, à Paris, dénonçaient publiquement les officiers francs-maçons dont ils donnaient les listes nominatives. Et l'on disait que le tableau d'avancement des officiers était soumis au Père du Lac, jésuite qui avait dirigé l'Ecole Sainte-Geneviève, avant d'être mis en oeuvre ...
Henri Mollin s'était marié, après sa nomination au cabinet militaire, avec Suzanne Thibault, la fille d'Anatole France, ce qui l'avait, provisoirement, rasséréné. Mais lorsque l'affaire des fiches éclate, en novembre 1904, Mollin sera sacrifié par le gouvernement et le général André obtiendra sa démission. Le ministre lui-même démissionnera quelques jours plus tard, le 15 novembre 1904. Le ministère Combes ne survivra que jusqu'en février 1905.
Mollin restera néanmoins toujours fidèle au général André. Même de façon feutrée, il fera porter la responsabilité de l'affaire des fiches sur le général Percin qui n'avait plus, depuis juillet 1902, des relations de confiance avec le général André depuis que ce dernier avait, en son absence, exclu du cabinet militaire le capitaine Humbert pour avoir accordé des passe-droits à des appelés parisiens. Or Percin et Humbert étaient très proches et avaient espéré, un temps, que le général André ne serait plus ministre de la Guerre dans le cabinet Combes constitué en mai 1902. Le bruit avait alors couru, dans la garnison de Paris, que Percin serait le nouveau ministre de la Guerre ...
On voit que l'affaire des fiches dépassait largement la personne du capitaine Mollin. La famille du général André sera toujours persuadée que Percin était à l'origine des fuites sur le système mis en place, dans le but de nuire à son ministre. Quant à Henri Mollin, il poursuivra une carrière hors de l'armée.
POUR EN SAVOIR PLUS.
Voir le livre de Serge Doessant, Le général André, de l'affaire Freyfus à l'affaire des fiches, Editions Glyphe, Paris, juillet 2009. 416 pages. Illustrations. ISBN 978-2-35815-013-2
Disponible dans toutes les librairies, à la Fnac, sur le site Amazon et chez l'éditeur (WWW.editions glyphe.com)
Bonjour...
Je sais que ce n'est pas bien de tenir des fiches sur des personnes.
Mais aujourd'hui ??? Vous savez bien que sommes fichés partout.
Et avec les Ordinateurs et Internet c'est encore pire.
Regardez...Si vous faites parti d'une fédération, ayant un groupement d'associations.
La Fédération Nationale à un Fichier de tous ses membres.
L'important c'est que les rapports ne soient pas falascieux.
L'important c'est que le respect de la vie privé soit maintenu dans tous les domaines.
Mais là ??? Ce n'est pas une mince affaire.
Le monde bouge,s'agite, en fonction du passé qu'il décrit,mais ce monde fait toujours pareil.
Car la solution...Elle est OU ???
Le monde est ainsi fait.
Le monde est toujours avide des secrets et des Histoires privées.
Si le monde n'en trouve pas...Il en invente.
Bien à Vous Jean Marie /K\
Rédigé par : Jean Marie Monka | 25/08/2009 à 20:57
Bonjour,
J'ai bien reçu votre commentaire à l'occasion de l'article sur le capitaine Mollin.
Vous avez raison de dire qu'aujourd'hui nous sommes souvent fichés.
Mais j'ai d'abord réalisé un livre d'histoire, une biographie du général André. Mon objectif a été de comprendre la période pendant laquelle Louis André a vécu et ses contradictions. Et c'est au lecteur de tirer éventuellement des conclusions personnelles, en application de l'adage "connaître le passé pour comprendre le présent."
S'agissant du capitaine Mollin, les archives m'ont montré qu'il s'agissait d'un brillant officier, comme tous ceux d'ailleurs qui étaient officiers d'ordonnance de général André au ministère de la Guerre. Or ils ont été, à l'époque et depuis lors, cloués au pilori, et il était important de rétablir, sur ce point, la vérité historique.
Je vous remercie, en tout cas, de l'intérêt que vous portez à mes recherches et à mon livre.
Cordialement.
Serge Doessant
Rédigé par : Serge Doessant | 29/08/2009 à 19:13